Portrait

Frédéric Couchet
/ Hyper activiste

Lundi 14 novembre 2016 - 16:04 | Mis à jour le Samedi 19 novembre 2016 - 16:56

Linda Maziz 

Geek. Il y a vingt ans, il a fondé l’April, pour promouvoir et défendre le logiciel libre. Aujourd’hui, insatiable défenseur de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, il s’est mis en quête d’une nouvelle cause dans laquelle s’investir.
Frédéric Couchet.
Frédéric Couchet.

« Parle-moi de tes enthousiasmes du moment. » C’est ainsi que depuis une semaine Frédéric Couchet s’adresse à ses proches. Depuis qu’il s’est « mis en mode ouverture d’esprit » et en tête de récolter « des idées auxquelles contribuer », avec l’envie d’être inspiré par d’autres causes, « d’autres ikigaï comme on dit en japonais », que celle qui anime cet activiste depuis vingt ans. L’activisme, pour ce geek de 46 ans, c’est « une valeur humaine essentielle », mais c’est aussi un état d’esprit, une philosophie et un besoin. Celui « de se rendre utile », « d’améliorer les choses », « d’avoir un impact sur la société ». De belles paroles qui sont loin de n’être qu’une simple déclaration d’intention. Changer le monde, il s’y attelle depuis 1996, année où il a créé l’April, pour promouvoir et défendre le logiciel libre, qui n’est rien de moins qu’une déclinaison des principes républicains appliqués au numérique. « Parce que le logiciel libre, c’est la Liberté, celle d’utiliser le logiciel, de comprendre son fonctionnement, de le modifier et de le redistribuer. C’est aussi l’Égalité, parce que tout le monde a les mêmes droits et c’est la Fraternité, parce que le but, c’est le partage et la coopération. »

Bien sûr, le logiciel libre, c’est avant tout un projet politique et c’est aussi cette dimension-là qui l’a porté dans son engagement militant. « Mes parents étaient de deux bords différents, donc ça ne parlait pas beaucoup politique à la maison... » Ça ne l’a pas empêché de s’y passionner très jeune. « D’ailleurs j’aurais fait Science Po, si je n’avais pas été aussi nul en anglais. » Finalement, il se retrouve à étudier l’informatique à Paris 8. C’est là qu’il a chopé le virus, contaminé par des profs acquis à cette cause. « Je n’avais pas le profil entrepreneur économique, mais plutôt social, du coup j’ai voulu créer une association. » Pendant dix ans, il s’y investit bénévolement, comme président. Au départ pour faire connaître le concept. « Et puis on a vu arriver des projets de loi qui allaient mettre en danger nos libertés. » Pour en assurer la défense, l’informaticien passe salarié et devient délégué général de l’April en 2005.

« J’ai l’avantage d’exercer plusieurs métiers. Je fais encore de la technique, mais je discute aussi avec des responsables politiques, des journalistes, j’anime des conférences... Dans le domaine du droit numérique, ça bouge tout le temps. Intellectuellement, c’est passionnant. » Le blues du dimanche soir, ce Dionysien ne connaît pas. « Moi je suis toujours heureux de me lever le matin. » Hyperactif et « monomaniaque », il a surpris tout le monde quand il a annoncé début novembre vouloir passer à mi-temps pendant un an. « On vit une époque de tensions, super difficile et déprimante et j’avais envie de me rendre disponible et de diversifier mon activisme pour contribuer à d’autres projets bénévolement. » Ce père de famille de trois enfants ne sait pas encore lesquels, mais il est confiant. « Il y a plein de projets positifs qui existent ! » Et de filer la métaphore avec le logiciel libre pour expliquer sa démarche.« C’est un peu comme sur Wikipédia. La plupart des gens ne sont qu’utilisateurs de l’encyclopédie, alors qu’il y a un bouton magique. C’est le bouton éditer, qui permet de passer en mode collaboratif. » Et c’est un peu l’équivalent de cette touche qu’il a aujourd’hui envie d’activer.